Introduction
L’Argentine a fait le pari, il y a plus de quinze ans, de rouvrir devant les juridictions nationales les enquêtes sur les violations des droits de l’homme commises pendant la dictature de 1976 à 1983. Ces crimes contre l’humanité — par conséquent imprescriptibles — ne sont plus aujourd’hui plongés dans l’impunité des lois de « point final » et « d’obéissance due » ni par les amnisties annulées, mais sont sanctionnés par des juges argentins devant lesquels témoignent les survivants des prisons secrètes, les enfants de disparus, les mères et les grands-mères de la Place de Mai[1]. Témoignent aussi des anthropologues qui identifient les cadavres enterrés dans les fosses communes, des journalistes, des historiens, des archivistes et parfois même des concierges d’immeuble ou des voisins qui ont été témoins par hasard des enlèvements des escadrons clandestins de la mort. De nombreux documents de l’époque sont aussi analysés au cours des procès ainsi que les archives de la CONADEP (commission de la vérité qui a récupéré les dénonciations des familles de disparus et des survivants dès la fin de la dictature) et les plaintes d’habeas corpus présentées devant les tribunaux de la dictature et qui n’ont jamais abouties. L’Argentine compte avec un système d’avocats publics de la défense de grande qualité, ce qui permet aux accusés qui ne veulent pas ou ne peuvent pas engager un avocat à leur frais, de bénéficier de très bons avocats pénalistes pour assurer leur défense.
Depuis la reprise des procès pour les crimes de la dictature, la justice a enquêté sur 3.329 personnes, parmi lesquelles 997 ont été finalement condamnées et 162 ont été acquittées. Plus de 250 personnes ont déjà bénéficié d’un non-lieu et 653 personnes impliquées dans ces enquêtes sont décédées[2]. Ces procès – contrairement à ce que soutiennent leurs détracteurs qui les assimilent à des actes de vengeance ou de persécution politique – garantissent les droits de la défense, et c’est aussi ce qu’ont considéré les juridictions françaises qui ont autorisé en 2019 l’extradition vers Buenos Aires d’un présumé ex-tortionnaire argentin vivant en France depuis la fin de la dictature[3]. [4]
Cependant, la justice argentine doit surmonter trois grands obstacles pour que ces procès aient lieu et puissent se dérouler dans les meilleures conditions.
Tout d’abord le manque de moyens pour traiter ce type de crime complexe qui requiert une augmentation des capacités d’enquête et de jugement des tribunaux nationaux, déjà débordés par la justice des crimes et délits actuels.
D’autre part, la clandestinité dans laquelle se sont déroulés ces crimes de la dictature rendent encore aujourd’hui difficile de trouver des preuves et d’identifier les accusés qui sont intervenus dans la disparition forcée et la détention arbitraire et clandestine de milliers de personnes dans tout le pays.
Enfin, l’urgence, car le temps fait vieillir aussi bien les accusés que les témoins. Combien d’enquêtes ont dû rester au stade de l’instruction car les personnes identifiées comme impliquées dans ces crimes étaient déjà décédées ! Oui, l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité a des limites car le temps fait disparaître les accusés et les survivants qui peuvent témoigner. La moyenne d’âge des victimes et des bourreaux tourne autour de soixante-dix ans et plus. Alors dans un tel contexte qui était déjà caractérisé par l’urgence il y a quinze années, comment le confinement de la justice argentine dû à la pandémie est-il reçu ?
Le confinement en Argentine a commencé le 20 mars suite à l’apparition des premiers cas de Covid-19 importés de l’étranger et a duré plus de huit mois, même si, depuis le 11 mai, certains commerces et industries ont pu reprendre le chemin du travail. Le fonctionnement de la justice subit également cette situation et même si elle est sortie du confinement total, elle s’exerce principalement par le télétravail et des tours de garde au sein des différentes juridictions.
Or dans ce contexte où le monde a basculé vers une dimension aux conséquences inconnues, la lutte contre l’impunité résiste en Argentine pour se maintenir dans l’agenda. Dès le début du confinement le Ministère Public argentin a demandé la reprise urgente des procès et des enquêtes pour les crimes de la dictature, soutenu dans ses démarches par des parties civiles et des associations de victimes, comme l’association des grands-mères de la Place de Mai, ou l’ONG historique CELS[5]. Aussi, en période de confinement stricte, trois verdicts ont été rendus à huis clos mais retransmis par internet[6], et un ex-tortionnaire de la dictature a été extradé depuis le Brésil après sept années de procédures judiciaire alors que les frontières avec le Brésil étaient fermées[7]. En ce qui concerne les enquêtes, au mois de juillet le juge d’instruction Daniel Rafecas a annoncé l’identification d’un autre centre clandestin de détention à Buenos Aires à partir de l’analyse d’anciens documents confidentiels des services secrets américains, ce qui permet d’ouvrir une nouvelle enquête et rechercher les témoignages de survivants de cette ancienne prison qui fonctionnait dans le sous-sol d’une maison[8]. Dans les Provinces de l’Argentine où le virus ne circulait pas encore ou très peu, les activités ont repris plus rapidement, ce qui a permis aussi la reprise des audiences des procès interrompus par la crise sanitaire. Dans les autres provinces, notamment la capitale Buenos Aires et sa petite couronne, qui n’ont cessé de voir augmenter le nombre de cas de Covid – 19, des « procès plateforme» – c’est à dire des procès réalisés par vidéoconférence – ont été mis en place. Ainsi, les efforts déployés par les autorités argentines pour juger les crimes contre l’humanité démontrent que la lutte contre l’impunité n’est pas seulement une question de persévérance mais aussi de créativité. Dans ce contexte hostile, il est intéressant d’analyser les nouveaux obstacles et les moyens mis en place par les autorités afin de garantir la continuité des enquêtes et des procès, tout en respectant les garanties d’un procès équitable et les droits de la défense.
L’Argentine et le droit international des droits de l’homme
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est nécessaire de rappeler que l’Argentine accorde une place centrale au droit international des droits de l’homme, aussi bien à travers le système international onusien que le système interaméricain des droits de l’homme. Depuis la réforme constitutionnelle de 1994, plusieurs conventions internationales des droits de l’homme ont été élevées au même rang que la Constitution argentine[9]. Aussi, le droit international des droits de l’homme ne se limite pas aux normes inscrites dans la Constitution mais aussi à l’interprétation de celles-ci par les organes juridictionnels et quasi-juridictionnels régionaux ou internationaux. En effet, la Commission et la Cour interaméricaines des droits de l’Homme ont développé une jurisprudence abondante concernant les obligations des Etats dans la prévention et la répression des violations graves des droits de l´homme dans la région, notamment en matière de réparation, qui impliquent aussi bien le jugement des responsables, le devoir de mémoire, le droit à la vérité et les mesures de garanties de non-répétition[10]. Ainsi des décisions fondamentales de la Cour Interaméricaine des droits de l’homme comme Barrios Altos[11] ou Velasquez Rodriguez[12] vont être citées expressément dans de nombreuses décisions argentines concernant la réouverture des procès pour les violations graves et systématiques des droits de l’homme.
A titre d’exemple, en 2004 la Cour Suprême dans l’affaire Arancibia Clavel a conclu que l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité était un principe de jus cogens qui obligeait l’Argentine même si elle n’avait pas encore ratifié la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre au moment des faits[13]. En 2005 dans l’affaire Simón[14], la Cour Suprême s’appuie sur la Convention américaine des droits de l’homme (CADH) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ainsi que sur la jurisprudence et la doctrine internationale pour démontrer que les lois d’impunité qui empêchent la poursuite des crimes de la dictature depuis 1986 et 1987 sont contraires au droit international des droits de l’homme aujourd’hui élevé au même rang que la Constitution argentine. Cette décision, pierre angulaire qui a consolidé la réouverture des procès pour les crimes contre l’humanité, est un véritable essai de droit international des droits de l’homme sur l’obligation des Etats à poursuivre les accusés des violations graves des droits de l’homme commises sur leur territoire. Cet arrêt reprend aussi l’évolution de la jurisprudence et de la doctrine onusienne notamment les principes établis par Louis Joinet[15] et démontre ainsi la perméabilité de l’Argentine face au droit international des droits de l’homme. Cette décision de justice a été réaffirmée peu après, dans l’affaire Mazzeo [16] dans laquelle la Cour étend son raisonnement et considère l’existence d’une règle de jus cogens qui interdit les crimes contre l’humanité.
C’est sur la base de ces développements internationaux en matière de lutte contre l’impunité que l’Argentine a donc initié le long et difficile défi de régler ses comptes avec un sombre passé dictatorial[17]. Au cours des procès, les tribunaux argentins n’ont pas abandonné le droit international des droits de l’homme, notamment en veillant au respect du procès équitable prévu à l’article 18 de la Constitution nationale et les articles 8 de la CADH e et 14 du PIDCP, et posent régulièrement les fondements des droits des accusées à la présomption d’innocence, au droit d’être jugés par un tribunal impartial, le droit d’interroger les témoins, le respect des délais raisonnables, le droit de ne pas s’auto-incriminer, entre autres. On peut citer par exemple l’affaire Patti dans laquelle la Cour Suprême argentine a considéré que le principe du juge impartial avait été respecté même si le procureur avait soupçonné le juge d’instruction d’être en faveur des lois d’amnistie à cause de ses déclarations dans la presse et son retard excessif dans l’instruction du dossier[18]. Le fait que ces crimes contre l’humanité puissent être jugés plus de trente ans après les faits apporte également des complications dans le domaine des droits de la défense et oblige les tribunaux à analyser de nouvelles tensions dans l’application du droit. Par exemple, l’article 8 de la CADH et 14 du PIDCD prévoient le droit de la défense à interroger les témoins. Or, il arrive parfois dans les procès argentins que les témoins et les survivants décèdent avant de pouvoir témoigner au procès. Dans ces cas, la justice argentine a considéré que l’incorporation des témoignages prêtés par les victimes et leur famille devant le juge d’instruction ne constituaient pas une violation du droit à un procès équitable. Grâce à cette interprétation elle a également autorisé l’incorporation des témoignages prêtés par des victimes au cours d’un premier procès lorsque celles-ci ne pouvaient témoigner dans les procès suivants, soit pour éviter une re-victimisation, soit parce qu’elles étaient décédées.
D’un autre côté, même si les articles 8 et 14 déjà cités prévoient la présence des accusés lors du procès, il est fréquent en Argentine que les accusés demandent l’autorisation au tribunal de ne pas assister à toutes les audiences. Dans la mesure où certains procès durent plusieurs années[19] et pour préserver l’état de santé de certains accusés très âgés, les tribunaux ont tendance à accepter leurs demandes. Dans certains cas, ils permettent aux accusés détenus en prison de suivre le procès par système de vidéoconférence. Dans la même ligne, les tribunaux ont autorisé le témoignage par vidéoconférence de témoins qui se trouvaient dans l’impossibilité d’assister à l’audience, souvent des témoins qui résident à l’étranger ou dans une ville éloignée du tribunal. Personne n’aurait pu imaginer alors que ce précédent de vidéoconférence allait être utilisé de façon systématique pendant la crise sanitaire. Cependant cette question de la vidéoconférence lors des procès ou de leur utilisation générale pendant la pandémie n’a pas été traitée dans la première résolution sur la crise sanitaire de la Commission interaméricaine des droits de l’homme[20].
Premières urgences face à la crise sanitaire : les conditions de détention des condamnés et des accusés.
La première résolution de la Commission Interaméricaine des droits de l’homme liée exclusivement à la pandémie mentionne bien évidemment le droit à la santé comme première préoccupation puis reprend les obligations des Etats dans le contexte d’exception comme l’obligation de maintenir le fonctionnement des pouvoirs judiciaires, législatifs et exécutifs[21]. Parmi les recommandations faites aux Etats, se trouve la recommandation 43 qui les enjoint à : Veiller à ce que dans le cas de personnes à risque dans le contexte d’une pandémie, les demandes de bénéfices pénitentiaires et de mesures alternatives aux peines de prison soient évaluées. Dans le cas de personnes reconnues coupables de violations graves des droits de l’homme et de crimes contre l’humanité, compte tenu de l’intérêt juridique concerné, de la gravité des faits et des obligations des États de punir les responsables de telles violations, de telles évaluations exigent des analyses et des critères plus exigeants, conformément au principe de proportionnalité et aux normes interaméricaines applicables[22]. Cette référence aux procès pour crimes contre l’humanité est l’unique mention faite par la Commission au début de la pandémie et s’applique aux conditions de détentions des personnes détenues.
En Argentine, dès le début de la pandémie de nombreux détenus pour crimes contre l’humanité ont demandé à être placés en détention domiciliaire. En l’espace de quelques semaines, 104 demandes ont été présentées, dont 41 ont été rejetées et 17 ont obtenu une réponse favorable[23]. Pour l’instant seule une minorité d’accusés et condamnés pour crimes contre l’humanité ont été autorisés à rejoindre leur domicile à cause de la pandémie mais il faut rappeler que 72 % des condamnés pour crimes contre l’humanité se trouvent déjà en détention domiciliaire pour des problèmes de santé liés principalement à leur grand âge[24]. Les 28 % restant sont détenus en prison et bénéficient de meilleures conditions d’emprisonnement loin des cellules surpeuplées des prisons argentines. Opposée à l’octroi systématique de la prison domiciliaire, la Procureur de l’Unité de poursuite des crimes contre l’humanité, considère que l’âge des détenus n’est pas le seul critère à prendre en compte pour évaluer la situation de chaque demandeur. Il faut également prendre en compte leur état de santé et veiller à l’application des protocoles sanitaires mis en place pour les lieux de détention[25]. En outre, le fait d’être placé en prison domiciliaire n’empêche pas non plus l’accusé de tomber malade[26]. C’est pourquoi, le juge devrait aussi prendre en considération la situation personnelle des détenus, notamment s’ils ont accès à la sécurité sociale ou à une assurance maladie, ainsi que les conditions dans lesquels se trouve le domicile où ils comptent effectuer la détention. Dans le contexte de pandémie, les juges qui ont décidé d’octroyer ce bénéfice ont pris en considération la situation de confinement générale dans laquelle se trouve le reste de la population et dans certains cas n’ont même pas voulu prendre la précaution de retirer le passeport du détenu, car les frontières étant fermées, il est presque impossible de quitter le pays.
On constate que dans sa résolution sur les obligations des Etats dans le contexte de pandémie, la Commission n’a pas fait mention de la nécessité de maintenir la continuité des procès. Cette question a été soulevée d’abord par la Procureur en charge de l’Unité des crimes contre l’humanité, ainsi que les parties civiles et a abouti notamment aux procès par vidéoconférence.
Les « procès plateforme »
L’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité permet la réalisation de procès plusieurs années après les faits, un temps nécessaire pour réaliser des enquêtes plus complexes tant par le nombre de victimes que le nombre d’accusés, mais l’expérience argentine met en évidence les limites réelles à ce principe. Ce pays qui a mis sur pause les poursuites pendant 20 ans d’impunité judiciaire, se trouve aujourd’hui face à la dictature du temps qui passe. L’urgence est quotidienne et les efforts des unités spécialisées dans les poursuites sont énormes mais ne suffisent pas: tout retard ne serait-ce que dans la citation des victimes ou des accusés, ou devant les juridictions d’appel qui voient s’accumuler les dossiers, peut conduire à laisser des crimes contre l’humanité dans l’impunité. Alors dans ce contexte, la suspension totale de la justice pour une période indéterminée pourrait causer une perte irréparable pour le processus judiciaire dans sa globalité mais aussi pour les victimes et pour les accusés qui verraient s’alourdir encore les délais. Dès le début de la crise sanitaire, plusieurs stratégies ont été mises en place en fonction de l’étape des procès et en fonction des régions. Cependant, la commission interdisciplinaire destinée à élaborer une stratégie nationale pour l’accélération et la continuité des procès sollicitée par l’Unité crimes contre l’humanité du Ministère Public au mois de mai, n’a pas encore été créée[27].
Pour évaluer la situation il faut savoir qu’il y a différentes réalités/nécessités et donc des solutions flexibles en fonction des circonstances. Ainsi le premier objectif dans ce contexte pandémique a été de terminer les procès en cours. Priorité a été donné à ceux en étape finale: d’abord ceux en attente de verdict puis ceux en étape de plaidoirie. Dans tous les cas, les salles d’audience se sont vidées, il a été nécessaire d’installer des systèmes de transmission en direct et des plateformes numériques pour organiser la participation de toutes les parties.
Progressivement, l’Argentine a ainsi commencé une nouvelle étape dans le jugement des crimes contre l’humanité : l’ère numérique. Ainsi plusieurs procès en attente ont commencé ayant internet comme salle d’audience. Les modalités varient en fonction des tribunaux et des accords entre les parties. Parfois le procès se déroule entièrement à travers une plateforme numérique, dans d’autres cas ce sont des audiences mixtes avec certains juges ou parties présentes dans la salle et le reste en vidéoconférence. Cependant on ne peut pas parler de procès virtuels car tout ceci est bien réel et pose autant de problèmes que de solutions. D’abord, ce type d’aménagement n’est pas prévu dans le code de procédure pénale, ce qui selon les avocats des parties civiles, signifie que ce n’est pas interdit par la loi. Mais pour s’opposer à ce type de procédure certains avocats de la défense ont soutenu qu’il s’agissait d’une violation des articles 8 d) de la Convention américaine des droits de l’homme et article 14 d) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques concernant le droit de se défendre personnellement et d’assister à son procès, ainsi que le droit de communiquer librement avec son avocat. Pour l’instant, cet argument n’a pas été accepté. Comme précisé auparavant, bon nombre d’accusés ne souhaitent pas être présents au cours des audiences en temps normal, surtout pour les procès qui durent plusieurs années, et demandent pour des raisons de santé une dérogation. Dans certains cas ils peuvent suivre les débats par système de vidéoconférence depuis l’institution pénitentiaire et comptent bien sûr sur la présence de leurs avocats à chaque audience. Ce système mis en place depuis plusieurs années a fait l’objet jusqu’à présent d’un consensus entre toutes les parties au procès.
D’autres défenseurs considèrent qu’il y a une violation de l’article 8 f) de la CADH et l’article 14 e) du PIDCD qui prévoient le droit des accusés d’interroger ou de faire interroger les témoins à charge. Ils craignent que les témoins qui apportent leur témoignage depuis chez eux, puisse recourir à des aides mnémotechniques ou être aidés par une tierce personne qui leur dicterait leur réponse. Pour répondre à cet argument les parties civiles et les procureurs rappellent aux avocats de la défense qu’ils ont déjà consentis à la déclaration de témoins par système de vidéoconférence lorsque ceux-ci résidaient à l’étranger et qu’il n’y a eu jusqu’à présent aucun procès pour faux-témoignage de survivants au cours de ces quinze dernières années en matière de crimes contre l’humanité[28].
Le premier recours opposé à la légalité de cette procédure judiciaire numérique a été pourvu devant la Cour de Cassation fédérale argentine contre un verdict de quatre ans de prison dans une affaire de trafic de stupéfiants. La Cour n’a pas encore tranché mais le Procureur en appel a considéré que le procès par vidéoconférence respectait les droits de la défense. Selon ce dernier, l’article 8-2, d) et e) de la CADH ne fait pas mention à une obligation de présence physique et cette convention doit être interprétée de bonne foi, comme le suggère l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités[29].
Ces procès numériques qui permettraient de ne pas alourdir encore les délais déjà importants pour juger les crimes du passé en Argentine, et dans ce sens favorisent aussi les droits des accusés à être jugés sans retard excessif, ne font pas l’unanimité non plus du côté des parties civiles et des survivants[30].
Certaines victimes sont prêtes à déclarer ainsi pour éviter de prolonger l’impunité mais d’autres souhaiteraient pouvoir « regarder les juges dans les yeux » quand elles témoignent des horreurs qu’elles ont subies, et pas seulement un écran. En effet, il est difficile d’imaginer des procès dans lesquels les victimes qui témoignent de faits traumatisants ne pourraient pas aller embrasser leur famille à la sortie de l’audience ou des verdicts de procès historiques sans accusés présents dans la salle. On peut imaginer une audience occasionnelle, mais un procès entier réalisé depuis son salon est une chose inédite. Selon l’avocate des parties civiles dans le procès Pozo de Banfield, Guadalupe Godoy, « la réparation ne passe pas seulement par le témoignage mais aussi par la mise en scène de la justice » [31]. Lorsque la situation sanitaire le permet, ces procès ont lieu de façon semi-présentielle permettant à l’une des parties d’avoir accès à la salle d’audience et offre aux autres parties la possibilité de participer via plateformes internet aux débats. C’est le cas notamment de l’actuel procès ESMA IV dans lequel l’avocat de la défense a choisi de présenter sa plaidoirie dans la salle du tribunal étant retransmis en direct pour l’intervention des parties depuis une plateforme numérique et retransmis en direct sur youtube pour le public général[32]. Dans d’autre cas, l’ensemble des parties au procès se trouvent connectées depuis leur domicile et l’audience a lieu entièrement par système de plateforme. Pour l’instant les témoignages des victimes se succèdent sur internet sans remettre en cause ce système même si elles expriment souvent la tristesse de ne pas pouvoir retrouver à la sortie leurs amis et leur famille. Certaines audiences nous transforment aussi en témoin de surprises impensées, qui n’auraient pu arriver dans une salle d’audience. Par exemple, à la fin de son témoignage par vidéoconférence sur la disparition de ses parents pendant la dictature, l’écrivaine Raquel Robles s’est dévêtue devant son ordinateur pour laisser apparaître des inscriptions en feutre sur son torse avec la question “où sont mes parents ?” et le nom de 500 disparus. L’écrivaine voulait ainsi illustrer son propos : à poil devant la justice, un jeu de mot en espagnol pour dire qu’elle se sent démunie devant la justice. Selon Robles, on ne peut pas parler de justice 44 ans après les faits et on ne peut pas demander aux victimes d’apporter des preuves de la disparition ou la torture car ce sont les tortionnaires qui connaissent les preuves et ne veulent pas les apporter[33]. Dans une salle d’audience normale, cette situation aurait été évidemment impossible.
D’un autre ordre mais également tout à fait inédit, une survivante du centre clandestin de détention situé dans l’enceinte du Régiment de Campo de Mayo a reconnu un de ses geoliers sur le point de témoigner par vidéoconférence. Il s’agit d’un ancien policier appelé à la barre en tant que témoin. La survivante a immédiatement prévenu son avocat qui est intervenu aussitôt à l’audience pour expliquer la situation. En conséquence, le témoignage de l’ancien commissaire a été suspendu pour prévenir une violation de son droit à se défendre (le droit de ne pas être obliger à témoigner contre soi-même) et quelques semaines plus tard ce dernier a été mis en examen après enquête par le juge d’instruction[34]. Ce n’est peut-être pas l’enceinte du tribunal mais le spectacle judiciaire est toujours au rendez-vous.
Alors, qu’en est-il alors de la publicité de ces procès atypiques ? Comme le souligne parfaitement Antoine Garapon dans son essai sur le rituel judiciaire, « le procès équitable est défini dans les textes internationaux comme une instance dont les juges sont indépendants, la défense libre et les débats publics. La publicité des débats est donc une garantie de la justice. Ce principe procède de l’idée que, en dernier lieu, l’arbitre suprême est l’opinion publique ; c’est elle qui juge les juge » [35]. Le fait que les débats aient lieu au domicile des parties ou dans des salles de tribunal vides rend-il moins publics ces procès ? La réponse est négative pour l’instant. En effet, ces « procès plateforme » sont retransmis sur internet. Selon l’étape judiciaire dans laquelle il se trouve, cette retransmission est tout à fait publique et dans d’autre cas, elle requiert de s’inscrire auprès du tribunal pour obtenir le lien à la salle numérique. Ainsi, comme pour les audiences habituelles, il faut présenter sa carte d’identité (l’envoyer scannée par email) avant d’entrer à la salle d’audience et le nombre de place sont limitées. D’autre part, les journalistes de la presse écrite ont continué à couvrir ces procès et certaines initiatives audiovisuelles ont vu le jour permettant la transmission en direct des témoignages filmés[36].
Cependant, travailler dans ces conditions requiert aussi un grand effort d’adaptation pour les agents judiciaires qui doivent aussi prévoir la possibilité de numériser de volumineux dossiers judiciaires.
Malgré tous ces efforts pour accélérer la justice ou réparer les retards de l’Histoire, le système est saturé. Il y a 70 procès en attente actuellement et 45% des affaires ouvertes sont toujours en phase d’enquête[37].
Conscient de la gravité de la situation, le Ministère Public argentin et certaines parties civiles et des associations de droits de l’homme ont réitéré récemment la nécessité de la réunion en urgence d’une commission spéciale et interdisciplinaire de la Cour Suprême, pour élaborer un protocole sur la continuité des enquêtes et des procès. Au début du mois d’octobre, le président de la Cour Suprême Carlos Rosenkrantz a enfin répondu favorablement à la demande de réunion. Ce juge fait actuellement l’objet d’accusations politiques très fortes pour son inaction concernant 50 jugements de crimes contre l’humanité en appel devant la Cour Suprême, qui n’ont toujours pas été traités et 500 autres décisions judiciaires contestées et en attente de résolution par la plus haute instance judiciaire du pays[38].
En outre, dans ce contexte assez hostile l’Argentine a commencé un débat parlementaire (sur plateforme numérique) pour réformer certains aspects de la justice. A cet égard, les organisations de droits de l’homme et l’association des avocats des parties civiles de crimes contre l’humanité ont proposé des amendements qui prennent en compte la nécessité d’avancer plus rapidement dans les enquêtes et les procès. Par exemple, ils suggèrent la création d’un bureau spécial au sein de la Cour Suprême qui serait en charge uniquement des questions relatives aux procès pour les crimes contre l’humanité. En moyenne il faut plus de trois ans et demi pour qu’un jugement pour crimes contre l’humanité fasse l’objet d’une confirmation de la Cour Suprême[39]. Sans cette instance supérieure, les jugements de première instance et d’appel ne sont pas définitifs et permettent non seulement l’impunité mais aussi exposent les accusés à des retards excessifs de la justice.
Conclusion
L’Argentine, comme le reste du monde, se retrouve plongée dans une nouvelle anormalité. Elle traverse cette tempête dans une économie déjà en crise, avec à la tête un nouveau gouvernement qui venait de gagner les élections et n’avait pas encore pu démarrer son propre programme politique et économique. Dans ce contexte, les acteurs de la lutte contre l’impunité pour les crimes contre l’humanité commis sous la dictature servent de boussole pour ne pas sombrer. Ils rappellent à la société argentine qu’elle a fait le pari de ne pas recourir aux instances internationales pour juger les violations des droits de l’homme du passé et continuent d’insister pour consolider une jurisprudence exceptionnelle. Même s’il reste énormément de travail à faire, la volonté de continuer à intégrer le droit international des droits de l’homme au cœur même des tribunaux et du pouvoir exécutif et législatif porte déjà en soi un effet réparateur sur la société. On peut s’interroger d’ailleurs sur les raisons pour lesquelles l’Argentine a si tôt décrété le confinement et tenter d’éviter les ravages de la covid-19 dans ce pays. Est-ce la volonté d’une société qui réfléchit au droit au deuil depuis plus de quarante ans et qui voudrait prévenir au lieu de subir les tragédies ? (Même si dans les faits, la covid-19 progresse malgré les mesures de prévention). L’Argentine n’aurait pas pu entasser des cadavres dans des camions frigorifiques comme aux Etats Unis, ou creuser des fosses communes, ou encore laisser les familles déposer les morts de covid-19 seuls dans la rue comme en Equateur[40]. Dans les faits, rien n’est jamais parfait, mais ce n’est pas un hasard si les associations CELS et Memoria Abierta, deux organisations de droits de l’homme très impliquées dans la lutte contre l’impunité pour les crimes contre la dictature et le travail de mémoire, ont publié récemment une recommandation à l’Etat pour la création d’un protocole d’intervention pour l’accompagnement des familles touchées par la covid-19 et le respect du droit au deuil[41]. Serait-ce que l’Argentine essaye d’écrire une nouvelle histoire ?
[1] Pour une analyse des développements historiques qui ont conduit à la réouverture des procès, lire Filipini Leonardo, «
Criminal prosecution in the search for justice», 2010, pp.11-28, https://www.cels.org.ar/web/wp-content/uploads/2011/10/makingjustice.pdf
[2] Ces statistiques sont élaborée par l’Unité des Crimes contre l’Humanité du Ministère Public Argentin et datent du 15 septembre 2020, https://www.fiscales.gob.ar/lesa-humanidad/argentina-llega-a-las-casi-mil-personas-condenadas-por-haber-cometido-delitos-de-lesa-humanidad-durante-el-terrorismo-de-estado/
[3] CE, 11 décembre 2019, M. Sandoval, n° 424993, §14 “ En huitième lieu, si M. Sandoval soutient qu’en cas d’exécution du décret attaqué, les conditions dans lesquelles il viendrait à être jugé en Argentine ne pourraient que méconnaître son droit à bénéficier d’une procédure impartiale et équitable, reconnu par l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et contreviendraient au principe général du droit qui subordonne l’extradition à la condition que le système judiciaire de l’Etat requérant respecte les droits et libertés fondamentaux de la personne, ses allégations se fondent sur des éléments de portée générale, sans que soient apportés des éléments circonstanciés de nature à établir qu’il risquerait d’être personnellement privé du droit à un procès équitable.”
[4] Sur l’affaire Sandoval, voir les commentaires d’Olivier Cahn dans cette Revue, n°14 (2016) et n°17 (2019).
[5] Au mois de mai 2020, la Procureur chargée de l’Unité des poursuites pour les crimes contre l’humanité du Ministère Public argentin a présenté une demande formelle à la Présidente de la Cour de Cassation afin d’informer que 22 procès étaient en attente à cause du confinement. Aussi, elle a demandé la mise en place d’une Commission spéciale interdisciplinaires composée de membres de l’exécutif, du pouvoir législatif et judiciaire afin d’étudier la reprise et la continuation des procès dans cette circonstances sanitaires. Sur ce sujet, voir article de Ailin Bullentin sur le site du journal Pagina 12, https://www.pagina12.com.ar/263582-coronavirus-y-dictadura-el-plan-para-reanudar-los-juicios-de
[6] Trois verdicts ont été rendus par les tribunaux de Mar del Plata, Rosario et Paraná.
[7] L’extradition de Gonzalo Sanchez accusé d’avoir participé de l’assassinat du journaliste argentin Rodolfo Walsh le 25 mai 1976 a eu lieu le 14 mai 2020 alors que les frontières entre les deux pays étaient fermées, https://www.telam.com.ar/notas/202005/463791-brasil-extradicion-gonzalo-chispa-sanchez-represion-esma-desaparicion-walsh.html
[8] Telam, 2/07/2020 https://www.telam.com.ar/notas/202007/484539-el-juez-rafecas-identifico-un-nuevo-centro-clandestino-de-detencion-en-floresta.html
[9] L’article 75, 22) prévoit que la Déclaration Interaméricaine des droits de l’Homme, la Déclaration universelle des droits de l’Homme, la Convention américaine des droits de l’Homme, le Pacte international pour les droits économiques, sociaux et culturels, le Pacte international pour les droits civiles et politiques et son protocole facultatif, la Convention pour la prévention du génocide, la convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes, la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discriminations raciales; la Convention contre la torture et les peines cruelles inhumaines et dégradantes; La convention pour les droits de l’enfant, ont le même rang que la Consitution, ne dérogent aucun de ses articles et sont complémentaires des droits et garanties qu’elle reconnaît. Postérieurement, ont été rajoutés la Convention interamericaine contre la disparition forcées, la Convention pour l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité, la Convention relative au droit des personnes handicapées et son protocole facultatif, la Convention pour la protection des travailleurs migrants et leur famille. D’autre conventions internationales concernant les droits de l’homme ont été ratifiées par l’Argentine et ont autorité au-dessus des lois, mais n’ont pas encore obtenu la hierarchie constitutionnelles, comme par exemple le Statut de Rome ou la Convention Internationale pour la protection de toutes les personnes contre la disparition forcées.
[10] Arrêts: Cour IADH, Velasquez Rodriguez c. Honduras, 29 juillet 1988, série C, n°4; Barrios Altos c. Pérou, 14 mars 2001, série C, n°75; Almonacid Arellano y otros c. Chili, 26 septembre 2006, série C, n°154; Gelman c. Uruguay, 24 février 2011, série C, n°221, entres autres.
[11] Arrêt: Cour IADH,Barrios Altos c. Pérou, 14 mars 2001, série C, n°75
[12] Arrêt: Cour IADH, Velasquez Rodriguez c. Honduras, 29 juillet 1988, série C, n°4;
[13] CSJN – 24/08/2004, Arancibia Clavel, Enrique Lautaro s/ homicidio calificado y asociación ilícita y otros -causa n° 259-, §29, https://www.mpf.gov.ar/Institucional/UnidadesFE/Arancibia-Clavel-CSJN.pdf
[14] CSJN, 14/06/2005, Simón, Julio Héctor y otros s/ privación ilegítima de la libertad, etc. Causa N° 17.768C, https://www.mpf.gov.ar/Institucional/UnidadesFE/Simon-CSJN.pdf
[15] Rapport final révisé, Administration de la justice et les droits de l’homme et des détenus, Question de l’impunité des auteurs des violations des droits de l’homme (civils et politiques), E/CN.4/Sub.2/1997/20/Rev.1, http://www.derechos.org/nizkor/doc/joinetf.html
[16] CSJN – 13/07/2007, Mazzeo, Julio Lilio y otros s/ rec. de casación e inconstitucionalidad, §15, https://www.mpf.gov.ar/Institucional/UnidadesFE/Mazzeo-Julio-Lilio-y-otros-CSJN-13-07-07.pdf
[17] En plus des procès, l’Etat argentin a renforcé les politiques publiques concernant le devoir de mémoire à travers la transformation d’ancien centre clandestins de détention en musée où se déroulent également des activités liées à la transmission de l’histoire et l’accès au droit à réparation pécuniaire pour les victimes et leur famille continue.
[18] CSJN – 10/07/2013, Patti, Luis Ab1ardo y otros si causa n° 15.438., http://sjconsulta.csjn.gov.ar/sjconsulta/documentos/verDocumento.html?idAnalisis=703001&interno=1
[19] Il suffit de citer comme exemple le procès ESMA III qui a commencé en 2012 et s’est terminé cinq ans plus tard. Il s’agit du plus grand procès pour les crimes contre l’humanité réalisé en Argentine avec 68 accusés et 789 victimes. Certains accusés sont décédés pendant la durée du procès et n’ont pas pu être jugés.
[20] Résolution de la Commission interaméricaine des droits de l’Homme Nro. 1/2020, adoptée le 10 avril 2020, https://www.oas.org/es/cidh/decisiones/pdf/Resolucion-1-20-es.pdf
[21] Op. Cit. §§ I et II.
[22] Traduction de l’espagnol par l’auteure.
[23] Voir l’article publié dans la revue des procureurs, 6/04/2020, https://www.fiscales.gob.ar/lesa-humanidad/se-rechazaron-41-arrestos-domiciliarios-pedidos-por-detenidos-por-crimenes-de-lesa-humanidad-y-se-concedieron-17-sobre-un-total-de-104/
[24] Voir les statistiques de l’Unité des poursuites des crimes contre l’humanité du Ministère Public argentin, 18/09/2020, https://www.fiscales.gob.ar/lesa-humanidad/argentina-llega-a-las-casi-mil-personas-condenadas-por-haber-cometido-delitos-de-lesa-humanidad-durante-el-terrorismo-de-estado/
[25] Voir les statistiques de l’Unité des poursuites des crimes contre l’humanité du Ministère Public argentin, 18/09/2020, https://www.fiscales.gob.ar/lesa-humanidad/argentina-llega-a-las-casi-mil-personas-condenadas-por-haber-cometido-delitos-de-lesa-humanidad-durante-el-terrorismo-de-estado/
[26] Actuellement, on sait que plusieurs détenus en prison domiciliaire ont attrapé la covid 19 lors de rendez- vous à l’Hôpital ou lorsqu’ils se trouvaient en institutions gériatriques.
[27] Au mois d’octobre, le président de la Cour Suprême a annoncé la tenue de la première réunion sur ce sujet, le 8 octobre.
[28] Le procureur de la Province de Mendoza Dante Marcelo Vega a publié son opinion contre les arguments des avocats défenseurs, en précisant notamment que ceux-ci ont consenti à maintes reprises à des témoignages via videoconférence et à nommer des avocats substitus lors qu’ils ne pouvaient pas assister à l’audience, journal Pagina 12, le 22 juin 2020, https://www.pagina12.com.ar/273861-los-juicios-por-delitos-de-lesa-humanidad-deben-y-pueden-con?cx_testId=3&cx_testVariant=cx_1&cx_artPos=2#cxrecs_s
[29] Opinion du Procureur Raul Plée, 14/09/2020, https://www.fiscales.gob.ar/fiscalias/dictaminan-ante-casacion-federal-la-validez-de-los-juicios-realizados-a-traves-de-plataformas-virtuales/
[30] Dans cet article plusieurs survivants expliquent les raisons pour lesquels ils préfèreraient témoigner dans une salle d’audience. Ils expliquent leur crainte à que cette justice par internet limitent davantage la visibilité des procès et parlent de leur nécessité personnelle d’être accompagnés tant par leurs avocats, que par leur famille et par la société; disponible sur https://www.pagina12.com.ar/265160-coronavirus-y-represores-el-juicio-por-los-crimenes-en-los-p
[31] Depuis 2012, le procès pour les crimes contre l’humanité commis dans la prison secrète de Pozo de Banfield, qui a fonctionné comme lieu de détention clandestin et maternité clandestine durant la dictature est prêt à commencer. Il a été repoussé d’abord pour permettre l’unification avec un autre procès ayant des accusés en commun, puis s’est retrouvé sans magistrat. Après huit ans d’attente, le début du procès a été suspendu au moi de mai 2020 à cause de la pandémie. Une nouvelle date d’ouverture des débats a été posée au 27 octobre 2020. Le procès commencerait d’abord de manière numérique avec la lecture de la mise en accusation puis devrait s’adapter à la possibilité d’un retour présentiel en fonction de la situation sanitaire et des protocoles existants. Voir article de Luciana Bertoia dans le journal Tiempo Judicial, 22/09/2020, http://tiempojudicial.com/2020/08/22/la-justicia-demora-algunos-juicios-emblematicos-por-delitos-de-lesa-humanidad/
[32] Cette audience peut encore être regardée via le canal de youtube du tribunal, https://www.youtube.com/watch?v=6m_ugpehm5s
[33] Voir l’article sur le témoignage de Raquel Robles, par Martha Dillon et Josefina Giglio dans le journal Pagina 12, 2/08/2020, https://www.pagina12.com.ar/282308-raquel-robles-ante-los-jueces-donde-estan-mi-mama-y-mi-papa-
[34] Le récit de cette audience par la journaliste Ailin Bullentini, pour le quotidien Pagina 12, https://www.pagina12.com.ar/284127-el-siniestro-caso-de-roberto-alvarez-el-testigo-reconocido-c et Le journal du procès avec un extrait vidéo des interventions des parties au procès concernant la situation exposée, https://kaosenlared.net/argentina-de-testigo-a-procesado-la-historia-del-ex-comisario-roberto-alvarez-audio-y-video/
[35] Garapon A., “L’âne portant des reliques”, Justice Humaine, 1985, p. 105
[36] L’association de reporters alternatifs La Retaguardia a été autorisée à transmettre une audience en direct sur internet concernant le témoignage d’une experte spécialisée en Archives et Droits de l’homme. Son témoignage a duré six heures et a pû être regardé par 1000 personnes, dépassant largement les possibilités des salles d’audience habituelles. L’experte a déclaré dans une salle d’audience où sur les chaises destinées au public avaient été placées des photos des victimes disparues. Seuls les juges étaient présents et les autres parties ont suivi l’audience et ont pu intervenir via la plateforme utilisée pour les procès numériques. Un résumé de cette audience ainsi qu’une photographie de la salle sur https://www.elcohetealaluna.com/el-vivo-de-los-juicios/
[37] L’Unité pour les crimes contre l’humanité du Ministère Public tient un registre statistique de l’état des affaires, https://www.fiscales.gob.ar/lesa-humanidad/estado-actual-del-proceso-de-juzgamiento-263-causas-estan-en-etapa-de-instruccion-y-67-aguardan-por-el-inicio-del-juicio/
[38] Irina Hauser et Luciana Bertoia, “Carlos Rosenkrants se souvient des procès pour les crimes contre l’humanité pour éviter un procès politique”, 4/10/2020, https://www.pagina12.com.ar/296666-carlos-rosenkrantz-se-acordo-de-las-causas-por-los-crimenes-
[39] Luciana Bertoia, “Les organismes des droits de l’homme demande l’accèlération des délais pour juger les crimes contre l’humanité”, 16/09/2020, https://www.pagina12.com.ar/292318-los-organismos-de-derechos-humanos-pidieron-mecanismos-que-a
[40] Tordini Ximena, El tiempo de la necroetica, 2020, Siglo XXI, pp. 35- 43, http://dev2020.sigloxxieditores.com.ar/wp-content/uploads/2020/07/Siglo-XXI_Crisis.-La-vida-en-suspenso.pdf
[41] CELS, Memoria Abierta, “Los duelos individuales y colectivos necesitan acompañamiento”, https://www.cels.org.ar/web/2020/08/los-duelos-individuales-y-colectivos-necesitan-acompanamiento/