J’étais il y a peu à Genève pour la soixante-dix-huitième session du Comité contre la torture, la dernière en ce qui me concernait.
Je dois vous avouer que les quatre semaines passées dans les locaux du Haut-Commissariat dans un contexte particulièrement complexe et tendu m’ont conduit à m’interroger à plusieurs reprises sur la pertinence d’une commémoration de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Alimentée par de nombreuses discussions avec des fonctionnaires onusiens ou diplomatiques désabusés, cette pensée m’a obsédé jusqu’à mon retour allant même jusqu’à m’interroger sur ma participation à un colloque que j’ai cru, je vous l’avoue, un peu vain.
Pourtant, je suis là aujourd’hui et j’avoue être satisfait de ne pas m’être laissé aller à ce pessimisme mortifère et ce, alors même que l’objet de nos discussions semble malheureusement oublié, dans les actes du moins, par beaucoup en ces temps troublés. Cette satisfaction vient bien entendu du fait que j’ai assisté à un formidable et très beau colloque mais aussi car je crois que ce qui nous réunit aujourd’hui est important et doit, avec d’autres initiatives durant ce mois, rappeler l’essentiel et le plus fondamental.
Si, ainsi que l’a rappelé M. l’Ambassadeur Ripert, René Cassin souhaitait que la Déclaration « qui a une très grande valeur morale, [soit] un guide pour la politique des gouvernements, un phare pour l’espoir des peuples, une plate-forme pour l’action des associations nationales ou internationales de caractère civique » , son adoption, nous le savons bien, hélas, n’a pas mis fin aux exactions, aux guerres, aux discriminations et autres violations en tous genres des droits de l’homme à travers le monde.
75 ans après sa proclamation, ici à Paris, nous en sommes encore une fois, comme à chaque anniversaire, à l’heure de son bilan… dans un contexte, et j’y reviendrai, qui nous oblige à un certain réalisme mais aussi à une possible, voire nécessaire, nouvelle réflexion.
La journée nous a permis de revenir sur son contexte qu’il faut toujours avoir à l’esprit, les étapes de sa genèse et les promesses qu’elle annonçait. Sa vision et son ambition. Celle d’être un arrière-plan conjoncturel, celui d’un monde occidental de l’après-guerre traumatisé par son histoire et les horreurs commises par le régime nazi. Les droits de l’homme étaient en ce sens le cadre idéologique dans lequel prenaient place une nouvelle forme de représentation collective des peuples, incarnant une façon de penser le monde et l’homme.
À la différence de la conception des droits de l’homme exprimée dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, lesquels s’articulaient autour de la définition d’un principe d’égalité politique entre les hommes, la ligne directrice propre à la Déclaration de 1948 était le rejet de l’idéologie nazie et la recherche de moyens de protections contre celle-ci. À cet égard, on qualifie souvent les droits de l’homme tels qu’ils furent conçus en 1948 à travers l’image d’un « miroir inversé du nazisme ».
En effet, dans leurs travaux, les rédacteurs ont systématiquement cherché à élaborer des principes en réaction aux horreurs de la deuxième guerre mondiale. L’interdiction de la torture, le principe de non-discrimination, le droit à la dignité sont autant de droits qui sont issus de l’ambition des rédacteurs, laquelle était de protéger les peuples du retour potentiel du nazisme.[1]
Mais c’est aussi une volonté de renouvellement. Progressivement, tout s’est en effet passé comme si les rédacteurs étaient guidés par cette conviction selon laquelle l’ancienne vision du monde s’effondrait peu à peu. Ce fut d’ailleurs rappelé par la délégation de l’Équateur qui, en 1948, affirmait : « Les Nations Unies doivent s’efforcer de créer un nouvel internationalisme démocratique ayant pour fin l’établissement d’une paix durable au lieu de la guerre et de la discorde. Les systèmes démocratiques doivent mettre sur pied un ordre social juste pour permettre l’avènement d’un siècle de progrès ».
Les rédacteurs élaborèrent alors une déclaration qui reflétait ce nouvel arrière-plan universaliste, orienté contre la guerre, compatissant envers les victimes et cherchant à dépasser le traumatisme du conflit mondial et ses multiples atrocités. Ainsi, tous les éléments, dans les premiers projets, qui exprimaient des reliquats de l’ancien paradigme des droits de l’homme furent définitivement écartés, pour faire place à l’expression d’une vision renouvelée du monde.
La première version définissait ainsi les règles que les individus devaient respecter vis-à-vis de leur États, et suivait ainsi l’ancienne conception des rapports politiques entre Etat et individus, où l’individu était avant tout subordonné à l’Etat. Mais, à la suite des constatations établies concernant les responsabilités des États dans les actes perpétrés contre les individus pendant la Deuxième Guerre Mondiale, le modèle fut complètement renversé et la Déclaration devint centrée sur les droits des individus et les règles que devaient respecter les États à leur égard. Comme le rappelle M. Nicole Questiaux, le changement, voulu par Cassin, de l’adjectif « international », initialement choisi pour le titre de la déclaration, en « universel » est une manifestation concrète de ce changement de perspective ou de paradigme. Pourtant, en ce mois de décembre 2023, c’est cette universalité qui nous interroge de manière évidente.
Si la Déclaration est à envisager, comme le rappelle Emmanuel Decaux, comme un socle juridique, n’est-elle toutefois pas fondée sur une assise utopique que le temps et les faits ont très rapidement révélée ? Plus radicalement, il faut se se demander si la Déclaration, malgré sa dimension morale et théorique indéniable, n’est pas restée cantonnée à un simple « appel mondial des droits de l’homme » sans réelle portée pratique. Dans cette affirmation un peu provocatrice, il y a du faux et il y a du vrai.
Du faux heureusement car il faut ici rappeler, comme le fait Frédérique Coulée, le rôle déterminant que la Déclaration a pu jouer dans l’affirmation du droit international des droits de l’homme et son institutionnalisation. Il est impossible en effet de nier son rôle et son apport dans la conventionnalisation du droit international des droits de l’homme et l’institutionnalisation des mécanismes, juridictionnels ou non, de leur contrôle. Ainsi que ce soit à l’universel ou au régional, comme le souligne très justement Umberto Cantu Rivero, les apports de la déclaration et la logique défendue par elle ont permis de mettre en place un cadre juridique pertinent et effectif au sein duquel elle joue une fonction de référence comme en témoigne la totalité des préambules et des mentions qui y sont faîtes. Au-delà, il est indéniable que la déclaration universelle a su drainer des conceptions et des approches des droits qui demeurent, encore aujourd’hui, pertinentes et non-discutées. Ceci apparaît de manière évidente, comme le rappelle très bien Roland Adjovi, au regard de l’action menée par l’Organisation des Nations Unies qui reste profondément ancrée dans les valeurs et les principes de la Charte que ce soit par l’action des Hauts commissaires qui se sont succédé ou par ce qui semble être régulièrement rappelé par l’Assemblée générale ou le Conseil des droits de l’homme dans le cadre de chacune de leurs résolutions. Un constat similaire s’impose au regard du relai régional que de nombreuses organisations et institutions, juridictionnelles ou non, lui assurent.
Du vrai aussi malheureusement car, force est de constater que l’état actuel du sujet et l’indifférence assez manifeste vis-à-vis de l’Homme montrent bien que la Déclaration ou que cet appel aux droits de l’homme n’a pas été totalement entendu et compris. Je serais même tenté de dire que certains Etats (beaucoup en réalité), n’en ont cure… Il est possible bien entendu de faire mention du rejet de l’universalisme prôné par la Déclaration qui, dès son origine, a été la source d’un conflit de visions des droits et des libertés proclamés par la Déclaration comme le rappelle William Schabas. Les huit Etats qui se sont abstenus lors de son adoption n’avaient en effet pas manqué de critiquer cette ambition sur plusieurs plans.
Le premier fut de considérer que la Déclaration, dès son origine, n’était pas suffisamment en phase avec une conception moderne des droits en négligeant de manière importante la dimension collective et économique des droits de l’homme. Il est possible ici de mentionner, pour illustrer, la position exprimée par le délégué de la Yougoslavie qui affirmait que : « La déclaration des droits de l’homme, établie après que l’humanité eut subi les épreuves terribles que lui a imposées le fascisme, ne saurait rester muette en face d’un tel ennemi. La nouvelle déclaration des droits de l’homme n’aurait pas dû se contenter d’énoncer ces droits en des termes qui sont déjà généralement connus ; elle aurait dû, au contraire, définir les conditions sociales et matérielles qui sont nécessaires pour que ces droits puissent être exercés. »
Une déclaration insuffisante pour certains donc, mais, plus grave, basée sur une conception individualiste des droits alimentée par une philosophie occidentale en décalage complet avec la conception de certains Etats qui repose davantage sur une approche collective de leur réalisation. En d’autres termes, la Déclaration s’affranchissait et s’affranchirait encore de l’idée du « moi commun » au profit d’une vision purement focalisée sur le « moi humain ». Développant ainsi une approche relativiste de la proclamation universelle, l’argument avancé repose sur une réfutation manifeste d’une volonté politique et uniformatrice des droits de l’homme.
Pour ma part, et cela rejoint la position de René Cassin rappelée par Nicole Questiaux, j’ai toujours cru cet argument totalement fallacieux dans la mesure où l’universalisme de la déclaration ne doit aucunement être entendu comme imposant un modèle unique de réalisation des droits mais plutôt comme un objectif à atteindre, un standard à réaliser en s’appuyant sur des conceptions, potentiellement distinctes, mais qui ne peuvent s’affranchir de l’idéal commun universel : la réalisation pour toutes et tous des droits. Le relativisme et l’universalisme ne sont ainsi pas antagonistes mais peuvent être envisagés conjointement sans remettre en cause l’idéal défendu depuis 1948. Je partage ainsi la position exprimée et développée par mon ami Kéba Mbaye qu’Adama Dieng a rappelée.
J’en suis convaincu et c’est pourquoi je rejette ces positions qui refuseraient d’admettre que la réalisation des droits doit s’affranchir des cultures et des histoires des peuples. Il y a une conjugaison possible, je l’ai vérifié plusieurs fois en pratique sur de nombreux sujets, mais, bien entendu, avec une temporalité qui peut être différente et qui doit être acceptée sans hésitation. Réaliser les droits dans la différence mais tout en poursuivant l’ambition partagée d’une évolution constante des sociétés… C’est ce qui doit être compris selon moi pour aller de l’avant.
Mais, là encore, cette idée d’évolution est contestée comme en témoignent les initiatives récurrentes des Etats qui, à travers la mention des « droits universellement reconnus » tentent d’échapper ou d’exclure ces évolutions sociétales de leur approche des droits de l’homme pour mieux les violer. J’évoque bien entendu des arguments régulièrement avancés et de plus en plus défendus, notamment par l’Organisation de la conférence islamique, sur les droits des LGBT qui ne sont en réalité que la résultante d’une interprétation évolutive des droits et des libertés et ne découlent aucunement d’une redéfinition de ces derniers. Je retiens ici surtout la forte dimension politique de l’argument qui, comme je le disais, n’exclut en rien l’évolution des droits dans le respect des convictions et des cultures. Les droits de l’Homme forgent leur légitimité des cultures et des peuples au sein desquels ils sont amenés à évoluer et à irriguer les rapports sociaux.
Du vrai encore car, à l’aune du contexte actuel, l’on est forcés de se questionner sur la portée réelle et concrète de cette déclaration. La Déclaration joue-t-elle ou peut-elle encore jouer un rôle ?
Fruit d’un rejet de la barbarie et des atrocités commises contre l’être humain lors du deuxième conflit mondial, la Déclaration semble être devenue une belle endormie. L’insouciance de la paix semble en effet avoir atténué la force de ce texte et sa portée sans que beaucoup n’en soient émus. Alors, bien entendu, il reste les universitaires, certains diplomates, pour y penser et la faire vivre. Il reste quelques déclarations politiques pour montrer que les valeurs qu’elles portent restent une boussole pour de nombreuses démocraties mais, admettons cette réalité sans se voiler la face.
Les conflits actuels et la situation des droits de l’homme dans une très large majorité d’Etats ne nous autorisent pas à rester uniquement admiratifs devant un texte sans être conscients des défis que nous opposent la situation de millions de personnes victimes des plus grandes atrocités ou tout simplement de l’arbitraire et du déni des droits de l’homme comme en témoigne certaines positions récentes d’un ministre de la République de notre pays.
Je rejoins ainsi totalement Fabian Salvioli : ne soyons donc plus uniquement passéistes ou contemplatifs mais comportons-nous avec ce texte comme l’auraient fait ses rédacteurs en réaffirmant avec force les valeurs d’une œuvre humaine tombée dans une forme de désuétude pratique et morale, voilà quelle doit être l’ambition. Constater cela, ce n’est pas nier sa valeur ou son rôle, c’est juste la formalisation d’un cri d’alerte qui doit être lancé pour que ce contre quoi elle avait été élaborée ne se reproduise plus. Plus largement, c’est aussi pour rappeler les impératifs qu’elle défendait et que nous devons porter. Il faut en ce sens sortir de l’argument de la facilité qui consiste à applaudir l’œuvre des rédacteurs sans considérer que celle-ci, avec le temps, a pu révéler des limites profondes. On ne peut voir la déclaration sans en contextualiser à la fois son élaboration et sa place actuelle dans une société internationale bouleversée et bien différente de celle qui existait en 1948.
Comment toutefois parvenir à offrir du lustre à ce qui constitue la plus grande avancée internationale en matière de droits de l’individu ?
J’avoue avec humilité ne pas avoir la formule idéale, surtout dans le contexte rappelé par Adama Dieng, mais plutôt quelques ingrédients qui sont susceptibles de nourrir le discours qui doit désormais être tenu.
Tout d’abord, je crois qu’il faut honnir toute position ou approche dogmatique. On peut avoir la conviction de la portée et des valeurs portées par la Déclaration sans avoir à entrer dans un conflit dogmatique sur l’individualisme ou le collectivisme des droits. En cela, je suis convaincu que même si l’approche défendue en 1948 était empreinte d’une certaine idéologie, elle est désormais dépassée et doit nous conduire à la revoir au profit d’une dimension véritablement inclusive et renouvelée des droits et des libertés proclamées.
Par ailleurs, il faut avoir une approche rigoureuse des droits qu’elle proclame en avançant un contenu qui, sur le fonds, doit être renouvelé dans son interprétation. Cela passe ainsi, non pas par une réécriture de la déclaration, comme l’a justement rappelé Magali Lafourcade, mais par une interprétation consolidée de son contenu et des droits qu’elle proclame. Celle-ci est rendue possible par l’action des organes de traités ou des juridictions régionales qui ont pu nourrir le contenu de ces derniers et développer une approche renouvelée. Le rôle de ces organes est déterminant car, parce qu’ils sont les garants du respect des traités qui traduisent conventionnellement les droits proclamés en 1948, ils sont les plus à même de nourrir cette approche consolidée de la Déclaration comme le démontre parfaitement Fabian Salvioli. Le soutien accordé à ceux-ci est ainsi déterminant même si, certains Etats, semblent en avoir décidé autrement dans les faits. Le Conseil des droits de l’homme a, dans ce cadre, un rôle fondamental à jouer et doit recentrer son action sur les défis prioritaires et la limiter à leur résolution. La priorité doit être établie et l’action de cet organe essentiel doit être focalisée sur celle-ci, fin de la dispersion donc… La Déclaration était une base d’action (malheureusement vite oubliée), elle doit retrouver cette place et cette fonction centrale et je suis convaincu que le Conseil des droits de l’homme est un acteur essentiel de cette réaffirmation forte de l’acquis de 48. Par ailleurs, je crois qu’il faut, sur le plan multilatéral, fédérer autour de l’idée essentielle qui nourrit la déclaration du « Vivre ensemble » comme j’ai pu le relever en échangeant avec Laurence Boisson de Chazournes. Cela peut sembler utopique ou tiré d’un slogan politique mais je crois fondamentalement que la Déclaration est un lien entre les Etats, un élément essentiel de leur coopération et de leur compréhension des autres. La Déclaration porte également, et c’est dans ses gênes, l’idée de cette coopération et de cette compréhension mutuelle qui doit nourrir les relations entre les Etats malgré leurs différences.
Lorsque je parle de compréhension mutuelle, c’est bien évidemment la compréhension des souverainetés, des peuples, des cultures, des religions, de l’histoire et d’assurer le respect de ces derniers sans aucune condescendance et encore moins du mépris. Etablir, dans le cadre des relations entre les Etats, les bases d’un dialogue respectueux de leurs peuples fondé sur une approche commune de la dignité et de la justice. Réinventer en somme cette « internationalité commune » qui a nourrit les débats en 1948 et qui, sans y parvenir, en a établi les bases. Enfin, développer une réelle diplomatie juridique seule à même de défendre et rappeler de manière objective les bases de la Déclaration et de son acquis.
Ceci rejoint d’ailleurs sur le fonds ce qui avait été rappelé par la délégation de la Syrie lors de l’adoption de la Déclaration : « Au nom de tous ces principes, les nations doivent faire œuvre commune; la délégation de la Syrie, comme beaucoup d’autres délégations, est convaincue que les désordres qui se produisent dans le monde, ne sont pas dus aux différends qui opposent les puissants et les faibles, les petites nations aux grandes; ils ne sont pas dus non plus au déséquilibre qui existe entre les nations, mais au fait que les mêmes chances ne sont pas accordées à tous les êtres humains. Si on donnait à tous les hommes les mêmes possibilités de développer leurs capacités et de suivre leurs tendances naturelles, ils vivraient fraternellement. Il faut que tous les hommes aient les mêmes possibilités de façonner leur vie. »
Venant de la délégation d’un pays qui a connu, dans un passé récent, les pires exactions et au sein duquel l’impunité règne encore de manière intolérable, cette formule en dit long sur les aspirations de 1948 qui, comme je le disais, semble s’être lentement mais très certainement consumées…
Pour y remédier, je crois ainsi fondamentalement au cadre multilatéral, fondé sur un partenariat réel et associant des intérêts multiples et décloisonnés comme l’a rappelé Fabian Salvioli. Des intérêts qui s’équilibrent les uns les autres et qui se structurent autour de la recherche d’un ordre normatif global, plus favorable à l’idéal des droits de l’homme et de celui de la Déclaration universelle, envisagée, comme l’instrument de l’internationalité humaine.
Le forum multilatéral est en effet celui qui me semble être le plus adapté afin de pouvoir trouver les moyens de la concertation et de la réaffirmation des convictions sans imposer l’idéologie qui, pour beaucoup, est un rempart à toute discussion. Ce multilatéralisme qui seul permettra d’universaliser les droits de l’homme, de faire de la communauté internationale tout entière le seul dépositaire de normes enfin universelles.
En ce 75e anniversaire de la Déclaration, je pense que qu’il faut donc soutenir l’essor du multilatéralisme, comme je l’ai rappelé, d’une part ; et l’essor d’un espace public international où la parole est alors donnée, comme l’a rappelé Antoine Bernard, aux acteurs non étatiques, médias, ONG, intellectuels, en bref, tous ceux qui participent de manière de plus en plus efficace au débat public mondial. Ainsi donc, la « diplomatie des droits de l’homme » s’exprimera directement dans la production normative qui s’opère au niveau multilatéral, ou indirectement en favorisant ce débat public mondial. Une diplomatie d’influence par le droit donc qui doit être concrète et pas uniquement fondée sur les mots ou de simples intentions abstraites. Une diplomatie qui s’appuie sur une expertise et sur une vision cohérente et objective des principes et valeurs qui gouvernent la Déclaration.
Mais, et c’est là où le plus complexe apparaît, car, pour y parvenir, pour permettre que le multilatéralisme dans toutes ses dimensions puisse assurer ce rôle essentiel et que ce débat global puisse s’ouvrir, il me semble essentiel de nourrir cette idée au sein des peuples eux-mêmes. Or, au regard de l’orientation observée chez beaucoup d’entre eux, c’est ici que s’ouvre sûrement le plus vaste chantier. En effet, les bouleversements politiques nationaux auxquels nous assistons et qui portent atteinte aux valeurs défendues jusqu’alors par les Etats qui étaient convaincus par l’idée d’un modèle démocratique, ne peut que nous inquiéter ici.
Les populismes, les fondamentalismes et les dérives autoritaires et sécuritaires qui les accompagnent nous éloignent en effet de l’ambition d’une internationalité autour des droits et des libertés. Je crois ainsi fondamentalement que la logique de réalisation et de réaffirmation nécessaire à cette internationalité retrouvée doit partir des acteurs nationaux, individuels ou étatiques, dans toutes leur diversité.
Que les institutions nationales et que les individus, ainsi que l’ont rappelé Magali Lafourcade et M. l’Ambassadeur Ripert, se mobilisent pour réaffirmer avec force l’acquis de la déclaration et le porte pour réaffirmer sa valeur et influer sur les représentants pour confirmer l’idée fondamentale qui a gouverné l’élaboration de ce texte.
Celle-ci est très simple et se retrouve d’ailleurs, comme le mentionne Anna Glazewski, simplement écrite à la fin du Préambule de la déclaration qui est : « l’idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations afin que tous les individus et tous les organes de la société, ayant cette Déclaration constamment à l’esprit, s’efforcent, par l’enseignement et l’éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d’en assurer, par des mesures progressives d’ordre national et international, la reconnaissance et l’application universelles et effectives, tant parmi les populations des États Membres eux-mêmes que parmi celles des territoires placés sous leur juridiction. »
Je crois que nous n’avons pas assez insisté sur cet élément essentiel et, comme l’a rappelé Kishore Singh, je pense que l’histoire récente nous oblige à le réaffirmer avec force et conviction. La Déclaration des droits de l’homme proclame en ce sens l’homme mais lui assigne également la mission de sa survivance. Pour reprendre ici la belle formule africaine : « L’homme est le remède de l’Homme » ; la plénitude de l’individu suppose la complémentarité de tous les hommes…
Ainsi, je rappelle toujours à mes étudiants que l’histoire des Droits de l’Homme en est, dans l’échelle de l’Histoire humaine, à sa genèse et qu’elle reste en construction (je suis d’ailleurs convaincu que le chantier ne sera jamais achevé). Je pense que les débats d’aujourd’hui, plus qu’à travers la commémoration d’une œuvre majeure de l’humanité, l’ont démontré et qu’il nous revient de poursuivre la construction et la définition de cette histoire avec ces aléas, ces combats mais aussi et surtout ces formidables réussites auxquelles nous devons être quotidiennement attachés. C’est le seul moyen de construire cette « internationalité humaine » que la Déclaration a ébauché.
[1] René Cassin affirmait lui-même, avant l’adoption de la Déclaration, qu’« A l’issue d’un conflit mondial où les hommes libres ont ressenti essentiellement la captivité et le silence forcé de la France, celle-ci doit redevenir l’interprète de leurs aspirations. Ils attendent d’elle une Déclaration réaffirmant d’abord les droits imprescriptibles de l’homme et du citoyen bafoués par la contre-révolution fasciste (…) ».
*
I was recently in Geneva for the seventy-eighth session of the Committee against Torture, my last.
I must confess that the four weeks I spent on the premises of the Office of the High Commissioner, in a particularly complex and tense context, led me on several occasions to wonder about the relevance of commemorating the Universal Declaration of Human Rights. Fueled by numerous conversations with disillusioned UN or diplomatic officials, this thought preoccupied me until I returned home, even going so far as to question my participation in a conference which, I confess, I found a little pointless.
But here I am today, and I must confess that I am satisfied that I did not succumb to this humiliating pessimism, even though, unfortunately, the purpose of our discussions seems to have been forgotten, at least in action, by many in these troubled times. This satisfaction comes, of course, from the fact that I have participated in a wonderful and very fine conference, but also because I believe that what brings us together today is important and should serve, along with other initiatives during this month, as a reminder of what is essential and most fundamental.
As Ambassador Ripert reminded us, René Cassin wanted the Declaration, « which has a very high moral value, to be a guide for government policies, a beacon of hope for peoples, a platform for action by national and international civil associations ». Unfortunately, we are well aware that its adoption has not put an end to atrocities, wars, discrimination, and other human rights violations of all kinds throughout the world.
75 years after its proclamation, here in Paris, as on every anniversary, we are once again taking stock… in a context, and I’ll come back to this, that forces us to a certain realism, but also to a possible, indeed necessary, new reflection.
The day gave us the opportunity to look back at the context of the project, which we must always keep in mind, the stages of its genesis and the promises it made. Its vision and ambition. Its vision and ambition: that of a post-war Western world traumatised by its own history and the horrors of the Nazi regime. In this sense, human rights were the ideological framework within which a new form of collective representation of peoples took place, embodying a way of thinking about the world and humanity.
In contrast to the conception of human rights expressed in the Declaration of the Rights of Man and of the Citizen of 1789, which was based on the definition of a principle of political equality among human beings, the guiding principle of the Declaration of 1948 was the rejection of Nazi ideology and the search for means of protection against it. In this respect, human rights as conceived in 1948 are often described as a « mirror image of Nazism ».
Indeed, the drafters systematically sought to develop principles in response to the horrors of the Second World War. The prohibition of torture, the principle of non-discrimination and the right to dignity are all rights that grew out of the drafters’ ambition to protect people from the possible return of Nazism.[2]
But it is also a desire for renewal. Gradually, everything happened as if the drafters were guided by the conviction that the old vision of the world was gradually collapsing. In 1948, the Ecuadorian delegation reiterated this point when it stated: « The United Nations must strive to create a new democratic internationalism, the aim of which is to establish lasting peace instead of war and discord. Democratic systems must establish a just social order to enable a century of progress to begin.
The drafters then drew up a declaration that reflected this new universalist background, anti-war, compassionate towards the victims and seeking to overcome the trauma of world conflict and its multiple atrocities. Thus, all elements in the first drafts that expressed remnants of the old human rights paradigm were definitively discarded to make way for the expression of a new vision of the world.
The first version defined the rules that individuals had to respect in relation to their states, thus following the old conception of the political relationship between the state and the individual, in which the individual was first and foremost subordinate to the state. However, following the lessons of the Second World War about the responsibility of states for acts committed against individuals, this model was completely overturned, and the Declaration focused on the rights of individuals and the rules that states had to respect in relation to them. As Nicole Questiaux points out, Cassin’s intention to change the adjective « international » originally chosen for the title of the Declaration to « universal » is a concrete manifestation of this change of perspective or paradigm. And yet, in this month of December 2023, it is this universality that clearly raises questions for us.
Although, as Emmanuel Decaux points out, the Declaration is to be seen as a legal foundation, is it not founded on a utopian basis, as time and facts have very quickly revealed? More radically, we must ask ourselves whether, despite its undeniable moral and theoretical dimension, the Declaration has not remained little more than a « world appeal for human rights » without any real practical scope. There is both truth and falsehood in this somewhat provocative statement.
Fortunately, this is not the case, as Frédérique Coulée points out the crucial role played by the Declaration in reaffirming and institutionalising international human rights law. Indeed, its role and contribution to the conventionalisation of international human rights law and the institutionalisation of mechanisms, judicial or otherwise, for its control cannot be denied. Whether at the universal or regional level, as Umberto Cantu Rivero rightly points out, the contributions of the Declaration and the logic it defends have made it possible to establish a relevant and effective legal framework within which it plays a reference role, as all the preambles and references to it testify. Moreover, it is undeniable that the Universal Declaration has been able to attract concepts and approaches to rights that remain relevant and undiscussed to this day. As Roland Adjovi rightly points out, this is evident in the actions of the United Nations, which remain deeply rooted in the values and principles of the Charter, whether through the actions of successive High Commissioners or through what seems to be a regular reaffirmation by the General Assembly or the Human Rights Council in each of its resolutions. A similar observation can be made with regard to the regional relay provided by numerous organisations and institutions, both judicial and non-judicial.
Unfortunately, this is also true because it has to be said that the current state of affairs and the rather obvious indifference towards the human being clearly show that the Declaration or this call for human rights has not been fully heard or understood. I would even be tempted to say that some States (many, in fact) do not care… Of course, we could also mention the rejection of the universalism advocated by the Declaration, which, as William Schabas reminds us, was from the outset the source of a conflict of visions of the rights and freedoms proclaimed by the Declaration. The eight States that abstained at the time of the Declaration’s adoption did not fail to criticise this ambition on several counts.
The first was that, from the outset, the Declaration was not sufficiently in tune with a modern conception of rights since it significantly neglected the collective and economic dimension of human rights. By way of illustration, we may mention the position expressed by the delegate of Yugoslavia, who stated that « The Declaration of Human Rights, drawn up after humanity had undergone the terrible trials imposed on it by fascism, could not remain silent in the face of such an enemy. The new Declaration of Human Rights should not have confined itself to stating these rights in terms that were already generally known; on the contrary, it should have defined the social and material conditions necessary for the exercise of these rights ».
An inadequate declaration for some, then, but, more seriously, based on an individualistic conception of rights, fuelled by a Western philosophy that is completely out of step with the conception of certain States, which is based on a more collective approach to their realisation. In other words, the Declaration was, and still is, moving away from the idea of the « common self » in favour of a vision focused purely on the « human self ». By developing a relativist approach to the universal declaration, the argument put forward is based on a clear refutation of a political and unifying will for human rights.
For my part, and in line with the position of René Cassin mentioned by Nicole Questiaux, I have always considered this argument to be utterly false, since the universalism of the Declaration should not be understood as the imposition of a single model for the realisation of rights, but rather as a goal to be reached, a standard to be achieved on the basis of potentially different conceptions, but which cannot be separated from the common universal ideal: the realisation of rights for all. Relativism and universalism are therefore not antagonistic, but can be considered together without calling into question the ideal defended since 1948. I therefore share the position expressed and developed by my friend Kéba Mbaye, which Adama Dieng recalled.
I am convinced of this, and that is why I reject those positions that refuse to admit that the realisation of rights must be free from the cultures and histories of peoples. It is possible to combine the two, and I have seen this in practice on many occasions and on many issues, but of course with a time frame that may be different and that must be accepted without hesitation. Realising rights in a different way, but at the same time pursuing the common ambition of constantly evolving societies… This is what I think we need to understand if we are to move forward.
But even here, this idea of evolution is contested, as shown by the recurrent initiatives of States which, by referring to « universally recognised rights », seek to evade or exclude these societal developments from their approach to human rights in order to better violate them. I am, of course, referring to the arguments regularly put forward and increasingly defended, notably by the Organisation of the Islamic Conference, on the rights of LGBT people, which in reality are no more than the result of an evolving interpretation of rights and freedoms and in no way stem from a redefinition of the latter. My main point here is the strong political dimension of the argument, which, as I have said, in no way excludes the evolution of rights while respecting beliefs and cultures. Human rights derive their legitimacy from the cultures and peoples within which they develop and influence social relations.
This is true because, in the current context, we are forced to question the real and concrete scope of this Declaration. Does or can the Declaration still play a role?
The result of a rejection of the barbarity and atrocities committed against human beings during the Second World War, the Declaration seems to have become a sleeping beauty. The carelessness of peace seems to have diminished the power and scope of this text, without many people being moved by it. Of course, there are still academics and diplomats who think about it and bring it back to life. There are still a few political declarations to show that the values it embodies remain a compass for many democracies, but let’s be honest.
The current conflicts and the human rights situation in the vast majority of States do not allow us to remain admiringly in front of a text, without being aware of the challenges we face in the situation of millions of people who are victims of the greatest atrocities or simply of arbitrariness and the denial of human rights, as shown by certain recent positions taken by a Minister of the Republic of our country.
I therefore fully agree with Fabian Salvioli: let us no longer be merely retrospective or contemplative but let us behave with this text as its authors would have done, vigorously reaffirming the values of a human work that has fallen into a form of practical and moral obsolescence. To note this is not to deny its value or its role; it is simply the formalisation of a cry of alarm that needs to be sounded so that what it was intended to prevent does not happen again. In a broader sense, it is also a reminder of the imperatives that it defended and that we must uphold. In this sense, we need to move away from the simplistic argument of applauding the work of the drafters without considering that, over time, it may have revealed deep-seated limitations. We cannot look at the Declaration without contextualising both its drafting and its place today in an international society that has been turned upside down and is very different from the one that existed in 1948.
But how can we add lustre to what is the greatest international advance in human rights?
I humbly confess that I don’t have the ideal formula, especially in the context described by Adama Dieng, but I do have a few ingredients that should fuel the discourse that needs to be developed from now on.
Firstly, I believe that we must reject any dogmatic position or approach. We can be convinced of the scope and values of the Declaration without entering into a dogmatic conflict about the individualism or collectivism of rights. In this respect, I am convinced that even if the approach defended in 1948 was imbued with a certain ideology, it is now outdated and must lead us to revise it in favour of a truly inclusive and renewed dimension of the rights and freedoms proclaimed.
In addition, we need to take a rigorous approach to the rights it proclaims, putting forward content that needs to be interpreted in a new way. This does not mean rewriting the Declaration, as Magali Lafourcade rightly pointed out, but rather consolidating the interpretation of its content and the rights it proclaims. This is made possible by the work of the treaty bodies and the regional courts, which have been able to feed on its content and develop a new approach. The role of these bodies is crucial because, as the guarantors of compliance with the treaties that translate the rights proclaimed in 1948 into conventional law, they are best placed to foster this consolidated approach to the Declaration, as Fabian Salvioli perfectly demonstrates. Support for them is therefore crucial, even if in practice some states seem to have decided otherwise. The Human Rights Council has a fundamental role to play here: it must focus its action on priority challenges and limit itself to resolving them. Priority must be established and the action of this essential body must be focused on it, so that the dispersion is brought to an end… The Declaration was a basis for action (unfortunately soon forgotten), it must regain this place and this central function and I am convinced that the Human Rights Council is a key player in this strong reaffirmation of the 48 acquis. I also believe that, at the multilateral level, we must unite around the essential idea that underpins the declaration of « coexistence », as I was able to point out in my discussions with Laurence Boisson de Chazournes. It may sound utopian or like a political slogan, but I fundamentally believe that the Declaration is a link between States, an essential element in their cooperation and in their understanding of others. The Declaration also carries within itself, it is in its genes, the idea of this cooperation and mutual understanding that must nourish relations between States despite their differences.
When I speak of mutual understanding, it is, of course, the understanding of sovereignties, peoples, cultures, religions and histories, and ensuring respect for them without any condescension and even less contempt. In the context of relations between States, to lay the foundations for a dialogue that respects their peoples and is based on a shared sense of dignity and justice. In short, to reinvent that « common internationalism » which fuelled the debates in 1948 and laid the foundations, albeit without success. Finally, to develop a genuine legal diplomacy, which is the only way to defend and objectively recall the foundations of the Declaration and its achievements.
The Syrian delegation, like many other delegations, is convinced that the turmoil in the world is not due to disputes between the powerful and the weak, between small and large nations, nor to the imbalance that exists between nations, but to the fact that all human beings do not have equal opportunities. If all men were given equal opportunities to develop their abilities and follow their natural inclinations, they would live in brotherhood. All men must have the same opportunities to shape their lives ».
Coming from the delegation of a country that has recently witnessed the worst atrocities and where impunity is still intolerable, this formula says a lot about the aspirations of 1948, which, as I said, seem to have been slowly but surely eroded…
To remedy this situation, I believe fundamentally in the multilateral framework, based on a genuine partnership and bringing together multiple and decompartmentalised interests, as Fabian Salvioli reminded us. Interests that are balanced and structured around the search for a global normative order more favourable to the ideal of human rights and to that of the Universal Declaration, conceived as an instrument of human internationality.
The multilateral forum seems to me to be the most appropriate to find ways of consulting and reaffirming convictions without imposing ideology, which for many is an obstacle to any discussion. This multilateralism is the only way to universalise human rights, to finally make the entire international community the sole guardian of universal standards.
On this 75th anniversary of the Declaration, I believe that we must support, on the one hand, the growth of multilateralism, as I have said, and, on the other hand, the growth of an international public arena where, as Antoine Bernard has pointed out, non-state actors, the media, NGOs, intellectuals – in short, all those who are participating more and more effectively in the global public debate – can have their say. Thus, « human rights diplomacy » will be expressed directly in the normative production that takes place at the multilateral level, or indirectly by promoting this global public debate. A diplomacy of influence through law, which must be concrete and not just based on words or simple abstract intentions. A diplomacy based on expertise and on a coherent and objective vision of the principles and values underpinning the Declaration.
However, and this is where the greatest complexity lies, in order to achieve this, to enable multilateralism in all its dimensions to play this essential role and to open up this global debate, it seems to me essential to promote this idea among the peoples themselves. Given the direction in which many of them are moving, this is certainly the greatest challenge. Indeed, the national political upheavals we are witnessing, which are undermining the values hitherto defended by those States that were convinced of the idea of a democratic model, can only give us cause for concern.
Populism, fundamentalism and the authoritarian and securitarian excesses that go with them are moving us away from the ambition of an internationalism based on rights and freedoms. That is why I am fundamentally convinced that the rationale for achieving and reaffirming this newfound internationality must begin with national actors, whether individuals or states, in all their diversity.
As Magali Lafourcade and Ambassador Ripert reminded us, national institutions and individuals must be mobilised to reaffirm the achievements of the Declaration, to use it to reaffirm its value and to influence representatives to reaffirm the fundamental idea that guided the drafting of this text.
This is very simple and, as Anna Glazewski mentions, is simply stated at the end of the preamble to the Declaration, which reads as follows « the common standard of achievement of all peoples and all nations, to the end that every individual and every organ of society, keeping this Declaration constantly in mind, shall strive by teaching and education to promote respect for these rights and freedoms and by progressive measures, national and international, to secure their universal and effective recognition and observance, both among the peoples of Member States themselves and among the peoples of territories under their jurisdiction. »
I believe that we have not sufficiently emphasised this essential element and, as Kishore Singh has pointed out, I believe that recent history obliges us to reaffirm it with strength and conviction. The Declaration of Human Rights not only proclaims the human person, but also gives him the mission of survival. To quote a beautiful African phrase: « Man is the remedy of man »; the fullness of the individual presupposes the complementarity of all men…
That is why I always remind my students that the history of human rights is still in its infancy in terms of human history and that it is still a work in progress (and I am convinced that it will never be completed). I believe that today’s debates have shown this, even more than the commemoration of a great work of humanity, and that it is up to us to continue constructing and defining this history, with its ups and downs, its struggles, but also and above all the enormous successes to which we must commit ourselves every day. This is the only way to build the « human internationality » outlined in the Declaration.
[2] René Cassin himself stated, before the adoption of the Declaration, that: « At the end of a world conflict in which free men essentially felt France’s captivity and forced silence, France must once again become the interpreter of their aspirations. They expect her to issue a Declaration reaffirming first and foremost the imprescriptible rights of man and of the citizen, which were trampled underfoot by the fascist counter-revolution (…) ».