10ème colloque du CRDH sur la Cour européenne des droits de l’Homme

Le 10ème colloque du CRDH se tiendra les 19 et 20 novembre en affiche colloque CRDHsalle des conseils de l’Université Panthéon-Assas (12, place du Panthéon) et portera sur « La Cour européenne des droits de l’Homme. Une confiance nécessaire pour une autorité renforcée ». Entrée libre sur inscription auprès de marine.bollack@u-paris2.fr

Programme du colloque à télécharger

Présentation

Le système européen des droits de l’homme a été et se voit actuellement confronté à plusieurs défis de taille.

Si les défis de l’« efficacité » et de la rationalisation de la gestion du contentieux (répondre dans un délai aussi raisonnable que possible à la demande de justice émanant du citoyen européen) est en passe d’être gagné, grâce essentiellement à la procédure expéditive prévue par le protocole n° 14, d’autres et plus redoutables défis pointent à l’horizon.

Ces défis se rapportent tous, bien que suivant des modalités différentes et adoptant des expressions diverses, au thème de la souveraineté tel qu’il est perçu au niveau judiciaire national, et singulièrement par les cours suprêmes et constitutionnelles, ainsi qu’au niveau politique des Etats.

En ce qui concerne les défis d’ordre « judiciaire », l’on assiste en effet à ce que l’on pourrait qualifier de « prise de conscience », aussi tardive qu’impromptue, du rôle effectif de la Cour de Strasbourg. Ce rôle apparaît s’inscrire désormais dans une démarche de « suprématie interprétative » en matière de droits fondamentaux, dont la coloration constitutionnelle est plus qu’évidente à travers une forme manifeste d’objectivisation du contrôle exercé par la Cour européenne. En réaction à cette tendance manifeste et qui peut être discutée, les prises de position de certaines cours suprêmes nationales (allemande et italienne, notamment) ont remis très clairement en question l’autorité de la chose jugée dont sont revêtus les arrêts de la Cour. Par exemple, les esquives de la Cour constitutionnelle fédérale allemande et le refus de la Cour constitutionnelle italienne de suivre l’interprétation donnée par la Cour de Strasbourg en ce qui concerne le principe de « sécurité juridique » témoignent d’une frilosité qui demande à être explicitée.

Les défis d’ordre politique sont tout aussi évidents, mais ils ajoutent en plus une composante émotionnelle. Pour l’essentiel, la critique part de la prémisse que la Cour de Strasbourg empiète indûment sur une compétence qui ne lui a pas été attribuée et s’ingère, ainsi, dans le domaine réservé à l’Etat national. Par exemple, l’arrêt Hirst (droit de vote des détenus au Royaume-Uni) témoigne de la désaffection britannique à l’égard du système de la CEDH. Le cas britannique n’est malheureusement pas le seul. Dans d’autres Etats, les critiques se font de plus en plus sérieuses et semblent évoquer un possible retrait du système de la CEDH ou, à moindre mesure mais avec des effets tout aussi importants, une remise en cause de la place que la Convention européenne occupe dans l’ordonnancement juridique interne.

Suivant la même ligne relative aux défis politiques, il est possible de constater que les relations entre Etats parties à la Convention sont susceptibles de pouvoir porter un coup majeur à la Communauté des Etats membres du Conseil de l’Europe. L’accroissement du nombre de requêtes interétatiques comme des requêtes individuelles résultant de conflits diplomatiques majeurs entre certains Etats parties à la Convention pose également la question du rôle de la Cour et de son contrôle dans ce cadre qui dépasse très largement la question juridique.

Mais au-delà de ces défis qui portent principalement sur les relations entretenues entre la Cour européenne et les Etats émergent également des problématiques plus larges posant la question de la place de la Cour européenne dans un environnement international de plus en plus complexe. Le récent avis négatif de la Cour de justice de l’Union européenne relatif à l’accord d’adhésion de l’Union à la Convention européenne exprime à lui seule une défiance externe vis-à-vis du système de contrôle et pose ainsi de nombreuses questions qui dépassent incontestablement l’office du juge européen pour atteindre sa position exclusive de juge des droits fondamentaux sur le continent européen.

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L’objectif de ce colloque, qui a été précédé (en avril 2015) d’un séminaire restreint réunissant plusieurs experts du système européen de protection des droits de l’homme (de la Cour européenne des droits de l’homme, du Conseil de l’Europe, des Etats et du monde universitaire), est d’identifier les causes de ces positions juridiques et politiques et de porter la réflexion sur les solutions permettant de pérenniser le système de contrôle institué. Ce colloque permettra ainsi d’offrir un relais académique à plusieurs initiatives institutionnelles sur la question et, en particulier, permettra d’offrir un regard critique sur les résultats de la Conférence de haut niveau qui s’est tenue à Bruxelles sur la question les 26 et 27 mars 2015.